Titre du roman : Hoài et le tigre
Genre : Fantastique léger, conte.
Public visé : 10 ans et plus
Nombre de signes : 150 000 sec
Hoài est un jeune garçon brillant qui vit dans un petit village du Viêt Nam. Il ne rêve que d'une chose : faire ses preuves pour devenir conteur. Il est le meilleur dans son domaine, et rien ne s'oppose à son avenir doré. Rien, sauf une chose : il y a déjà un très bon conteur au village, et la coutume veut qu'on ne le remplace que lorsqu'il devient trop vieux. Personne n'a besoin de lui. Même sa mère, malade, refuse d'écouter ses histoires pleines d'espoir de guérison, et préfère se laisser mourir doucement.
Frustré, Hoài échappe quand il le peut à ce monde qui l'empêche d'avancer et s'évade dans la jungle pour vivre les aventures des héros de ses contes. Jusqu'au jour où il boit dans la même rivière qu'un grand tigre doré et croise son regard. Un regard qui lui apportera un ami fidèle et dangereux ; un regard qui le mènera bien loin de chez lui, sur les traces de son métier de conteur.
Un regard qui intéresse beaucoup cet étrange shaman qu'il a aperçu quelquefois, celui qui semble toujours cacher quelque chose.
"Je t'appellerai Anh. Ca veut dire "rayon de soleil". Parce que c'est à ça que tu ressembles : au dernier rayon de soleil avant le crépuscule."
Extraits :
Voici le tout début du récit (encore modifiable) :
1
Je cours tout droit, toujours tout
droit. L’air moite s’engouffre dans mes poumons et gêne ma respiration, mais
j’accélère encore.
« Non, Hoài. Je t’ai déjà dit qu’on ne pouvait pas avoir deux
conteurs.
–
Mais je suis le meilleur !
– Chi
Tài occupe cette fonction depuis des années, et ses histoires t’ont bercé
depuis tes premiers jours. Tu ne veux quand même pas que nous lui demandions de
partir ? »
J’esquive de justesse le panier suspendu à la
longue perche posée sur les épaules d’une femme qui se retourne sur mon passage,
prends une grande goulée d’air, saute par-dessus une flaque de boue, fonce de
plus belle. Les arbres apparaissent à l’horizon. J’accélère.
« Et si tu devenais scribe ? Luu Ly a besoin d’aide, elle ne
sait plus où donner de la tête avec ces Blancs qui débarquent au pays pour
acheter nos arbres.
– Ce
n’est pas écrire que je veux, c’est raconter ! Voir les visages des adultes
s’illuminer au moment du baiser, sentir les enfants frémir devant les crocs du
tigre et les yeux de l’aigle ! »
Aux premiers cacaoyers, je quitte
le chemin pour plonger au cœur des hautes fougères, saute par-dessus un tronc
recouvert d’une mousse épaisse, m’écarte d’une dionée rouge vif aux dents
acérées, butte sur une énorme racine. Enfin, je parviens à une petite clairière
où les fruits du dragon ont colonisé tous les arbres, les parant d’élégantes
boules roses. Ça fera l’affaire.
Mains écartées, menton levé, je
prends une longue inspiration.
« Aaaaaaaaaaah !!! »
Mon cri résonne dans la jungle,
vite étouffé par les mille bruits de la nature. Rien à faire, cette fichue
frustration est toujours là, coincée dans mon ventre.
Un papillon aux ailes bleu vif se
pose non loin de moi, fait frétiller ses antennes, s’immobilise, puis s’envole
d’un bond joyeux. Je soupire et m’assieds sur une souche pour le suivre des
yeux.
« J’aurais pu leur montrer ta
beauté, celle qui est renfermée dans un affreux cocon jusqu’à ta renaissance.
J’aurais pu leur raconter l’histoire de Buòm, la chenille qui voulait devenir
un papillon, mais à qui on refusait la nourriture dont elle avait besoin pour
fabriquer sa chrysalide. »
Le papillon revient vers moi,
virevolte autour de mon visage. Un rayon de soleil perce le feuillage dense et
fait miroiter son aile limpide. Et puis zut. Tant pis s’ils ne sont pas là pour
m’entendre.
Au début, je vais lentement, je
choisis soigneusement mes mots, j’installe l’ambiance. La petite chenille est
très jalouse du beau papillon jaune, elle rêve de devenir comme lui. Les autres
chenilles se moquent d’elle, car elle est de l’espèce des papillons gris.
À mesure que l’histoire avance, je
prends de l’assurance et ma voix de l’ampleur. Je lui donne des intonations, je
joue avec mon public imaginaire pour lui faire deviner la suite. La petite
chenille essaie de se nourrir comme le papillon jaune, mais elle ne parvient
pas à attraper le pollen. Alors, que fait-elle, à votre avis ? Elle
se nourrit de feuilles, comme les autres chenilles ? Non, bien sûr que
non. Elle est très têtue, alors elle se fabrique des pattes identiques à celles
du papillon jaune.
Je ris en visualisant la scène, me
lève, marche de long en large pour évoquer la progression de la chenille.
J’anime le récit de gestes vifs, un sourire au coin des lèvres, l’œil brillant.
Mon public imaginaire est captivé.
« Alors, le papillon jaune
remarque la petite chenille.
– Que fais-tu avec ces fausses pattes ?
– Je veux devenir comme toi, répond-elle.
– Peuh ! C’est ridicule ! Tu es
née grise, tu seras grise, voilà tout.
Il la nargue d’un battement
d’ailes majestueux. »
Une grosse goutte s’écrase sur mon
bras, aussitôt suivie de milliers d’autres. En quelques secondes, je suis
trempé jusqu’aux os. C’est bien ma veine ! Je laisse ma chenille de côté
pour me frayer un chemin jusqu’à la lisière de la jungle. Les pluies de mousson
sont dangereuses, on ne sait jamais combien de temps elles vont durer. Mieux
vaut que je rentre au village.
Je marche sous la pluie battante,
accompagné de ma chenille et de mon public imaginaire. Elle construit
laborieusement son cocon, vexée par la moquerie du papillon jaune. Elle se
résigne à devenir un banal papillon gris puisqu’on ne lui laisse pas le choix.
Les premières maisons du village
apparaissent autour du chemin boueux. La vieille Nhung, accroupie comme
toujours sur le pas de sa porte, me regarde passer avec son sourire édenté. Les
flaques ont grossi. Je marche dedans sans me soucier de salir mon pantalon de
toile, jette un regard oblique à la place du village. Des hommes s’abritent
sous le toit de la petite pagode en plaisantant. Chi Tài est avec eux. Il
m’adresse un signe de la main, fait un pas dans ma direction. Je serre les
dents, dépasse le marché, quitte le chemin pour m’enfoncer entre les maisons. Je
parviens à la deuxième rangée, lance un coup de pied rageur dans la boue, qui
s’étale sur le mur d’une chaumière au toit à moitié pourri. Puis je pousse sa
porte en bois, qui grince à mon passage, et rentre chez moi. Je soupire.
La petite chenille sort de son
cocon et devient un superbe papillon bleu, plus majestueux encore que le
papillon jaune.
« Quand on veut assez quelque
chose, on finit toujours par l’avoir. »
Le public imaginaire applaudit à
tout rompre.
Gros coup de coeur pour ce magnifique nouveau projet, bravo !
RépondreSupprimerMerci Syco, ça me touche beaucoup !
SupprimerTrès très belle entrée en matière ! C'est drôlement chouette comme projet !
RépondreSupprimerJe suis contente qu'il te plaise <3
SupprimerJe viens de découvrir ce projet ! Décidément, tous tes projets sont plus beaux les uns que les autres !
RépondreSupprimerCela me rappelle un conte qu'on a vu à l'atelier (de contes), qui s’appelait "Duembe et le faiseur de souhaits", ou quelques chose qui y ressemblait (notamment, je ne suis pas sûr du prénom du jeune garcon).
Bon courage pour vivre ce projet !
Le début est très prometteur, et j'ai hâte d'en savoir plus !